F1 Grand Prix d’Imola 2022 : les enseignements

F1 Grand Prix d’Imola 2022 : les enseignements

“La vita in Formula 1 non è mai un fiume calmo” (“La vie en Formule 1 n’est jamais un fleuve tranquille”)

Tu peux sortir ton CD de Pavarotti et tes pâtes linguine “Al Dente”. Sur les terres de la Scuderia, à Imola, nous allons creuser dans les méandres de la Formule 1 ! Celle qui nous amuse, fait de politique et de course automobile !

Ferrari et ses écuries clientes: une stratégie payante?

L’ensemble des écuries motorisées Ferrari performent en ce début de saison : La marque au cheval cabré est désormais l’écurie à battre. Alfa Romeo et Haas viennent elles se placer directement dans le top 10.

Le bonheur des uns fait le malheur des autres ! Mclaren, Aston Martin ou encore Mercedes (entre autres) ont reculé dans la hiérarchie.

Beaucoup d’écuries sont désormais étrangement gênées par le lien étroit qui existe entre Ferrari et Haas. Ferrari est le fournisseur officiel de la plupart des pièces Haas et du moteur de l’écurie américaine. Ils ont donc une relation client – fournisseur.

En découle certaines interrogations :

    – Quelle est la transmission de savoir autour de ces pièces ?
    – A quel point Ferrari aide Haas dans l’exploitation de ses pièces et du moteur ?
    – Romain Grosjean était-il un reptilien qui voulait prendre le contrôle de la firme italienne par le biais de Haas ?

Non, je déconne ! Tu as vu le nombre de fois où il est parti taper le mur ? C’est pas gratuit tout ça !

Si tu ne le savais pas, Haas achète la plupart de ses pièces à Ferrari et est motorisée par celle-ci.

D’un côté Ferrari revend ce savoir-faire, d’un autre côté Haas achète celui-ci, un partenariat gagnant-gagnant pour un budget serré comme celui de l’écurie américaine.

Gutierrez Haas F1 team

Alors là, forcément, tu as Edvige, la RH, qui va te dire : “Oui bah alors pourquoi ils ont pas la même voiture ?! ”

Ecoute Edvige, si je te donne toutes les pièces de la fusée Ariane, tu vas probablement arriver à me fabriquer au mieux un touk-touk…

Non pas que les ingénieurs de Haas soient mauvais. L’écurie et ses ingénieurs méritent leur place au sein de ce sport et l’ont démontré avec une belle prestation en terminant notamment à la 5e place constructeur en 2018.

Néanmoins, il est certain qu’ils ne bénéficient ni de l’aura ni du budget ni de l’expérience que possède Ferrari.

Avec une grande partie des pièces similaires et le même moteur, on obtient pas forcément le même résultat. La raison à cela est simple :

Dès qu’une pièce est placée à un endroit différent sur la voiture, les flux d’air différent. Il faut donc adapter la venue de ce nouveau flux d’air afin de ne pas perturber l’aérodynamisme et l’équilibre de la voiture.

On décide de ce fait de mettre une pièce à un endroit différent ou de modifier légèrement une pièce afin de l’adapter à ces nouvelles contraintes. A cela s’ajoute le fait que Haas doive produire une partie de ces pièces ce qui l’éloigne du design de Ferrari.

Enfin, et non des moindres, les écuries partagent parfois le même système de soufflerie (comprendre le principe d’une soufflerie). Ce qui est sous-jacent à cela, c’est la transmission intellectuelle sur la collecte de données et l’exploitation de celle-ci.

On comprend dès lors la problématique : transmission de pièces, même moteur, partage des éléments de soufflerie. La zone de transmission de savoir-faire dans tout cela est très encadrée mais reste un point de tension majeur particulièrement lorsqu’une écurie B comme Haas émerge comme un concurrent aux écuries de premier plan.

On a connu le cas récemment avec Racing Point (ancien nom de l’écurie Aston Martin) qui avait littéralement copié le design de la Mercedes et était venu, grâce à cela, jouer plusieurs podiums en 2020. Un regain de forme qui avait fait grincer des dents tout le paddock et avait déjà questionné sur le lien qui était établi entre une écurie top team fournisseur et son écurie cliente.

Tu imagines Leclerc voir Stroll devant lui à la régulière ? Il a dû en défoncer des pots de Haagen Dazs devant les replays des Grand Prix…

A l’heure actuelle, on ne sait pas exactement quelle information accompagne le transfert de ces différentes pièces. Au sein d’un plateau qui se regroupe, les adversaires de Ferrari peuvent accuser la marque de favoriser son écurie B dans le but de la positionner comme un concurrent direct à certains de ses adversaires.

Le temps de roulage et le budget limités par le règlement

Les pilotes ont interdiction de rouler avec leur écurie entre les courses. Afin d’expliquer cela, la Formule 1 encadre le temps de roulage de toutes les écuries.

Qu’est-ce que cela signifie? Globalement, qu’en dehors des Grand Prix (essais, qualifications et courses), les écuries ont l’interdiction de rouler !

Seuls les essais privés, composés de quelques jours, permettent d’engranger des heures de roulage lors de la pré-saison et de la fin de saison. Nous mettrons à part les journées de roulage promotionnelles qui, très encadrées, n’apportent pas de données exploitables.

Cela veut dire que les écuries en F1 ne peuvent pas tester en condition réelle de nouvelles pièces ni de nouveaux réglages sur leur voiture.

Les pilotes sont eux aussi pénalisés puisqu’ils ne peuvent s’entraîner que sur le simulateur. C’est ce qui explique en partie les problèmes de certains pilotes comme Ricciardo à s’adapter au style de conduite en conditions réelles de sa Mclaren.

Après mon petit Daniel, avoir besoin de plus de 9 mois d’adaptation, c’est comme si tu passais ton code de la route après l’avoir raté 5 fois de suite et que tu choisissais encore la réponse B : “boire au volant permet de mieux voir la nuit”.

Riccardo F1 Mclaren

Il est vrai que les pilotes peuvent faire du karting, conduire tout type de voiture de course, faire du simulateur…Mais ils ne peuvent pas s’entraîner en conditions réelles en dehors des week-end de course sur leur F1 respective.

D’ailleurs, si une écurie est en retard lors de la première course, elle tente de tester le maximum de pièces lors des essais de Grand Prix. Ensuite, elle va analyser, puis valider la création de nouveaux composants qui mettront du temps avant d’être incorporés au modèle en soufflerie puis sur les circuits. (On parle souvent de plusieurs semaines).

Tu comprends mieux maintenant pourquoi la courbe de développement reste limitée. Elle l’est d’autant plus que, désormais, le budget est plafonné afin de limiter les dépenses et réduire les écarts entre les écuries.

Il est passé de 175 millions de dollars à 140 millions en 2022 et sera abaissé à 135 millions en 2023.

Forcément, si je te donne “budget illimité” chez BMW, tu ressors avec le modèle M5 avec toutes les options. Si, par contre, je te donne un budget fixe, tu vas te poser et réfléchir si, pour toi, il est mieux de prendre une M5 sans options ou un modèle inférieur avec les options nécessaires.

Il faut valider les évolutions avant de les développer et de les apporter sur le circuit. En cas d’erreur, cela pourrait représenter un gaspillage significatif du budget. L’efficacité est désormais au centre des préoccupations.

Cette limitation pèse comme une contrainte supplémentaire, ce qui génère de la frustration et de la pression.

Le week-end compliqué de Ferrari et Hamilton

Je ne peux pas commencer à commenter le résultat du Grand Prix d’Imola sans consacrer une partie à la course sprint de samedi.

La course sprint, pour que tu comprennes, est un nouveau format de course qui équivaut à 30% d’une course réelle. Ces courses sont introduites sur certains week-end de course déterminés par la formule 1 (environ 3 fois par an actuellement).

Le but officiel est d’offrir une course où les pilotes peuvent courir à fond sans contraintes de dégradation de pneus et de gestion de carburant.

En réalité, le but est de nous coller une course supplémentaire qui, grâce aux droits télé, génère des revenus supplémentaires.

Mise en place l’année dernière à 3 reprises, cela nous a donné à chaque fois des courses insipides.

Ce samedi, pourtant, on a eu le droit à des dépassements et un peu de spectacle. La course sprint en F1 serait-elle en fait une bonne idée ?

Penser cela, c’est comme se dire que parce que Latifi arrive à terminer une course sans percuter le mur, il finira champion du monde devant Bottas et Stroll.

Car tout a été déterminé en amont de la course sprint lors des qualifications sous la pluie.
Un Carlos Sainz seulement 10e, une Haas 4e, aucune Mercedes dans le top 10…

A la fin de la course sprint, certains pilotes, comme Georges Russel se sont encore une fois exprimés contre celle-ci expliquant à quel point, pris dans le trafic, il n’y avait rien à en tirer.

Ce à quoi, Ross Brawn, directeur sportif de la F1, prêt à tout pour défendre ce nouveau gagne-pain, a répondu : “Nous ne nous intéressons pas vraiment aux avis des pilotes de fond de grille sur ce type d’épreuves”.

Ross Brawn directeur technique Mercedes F1

Okay, donc là Ross, je résume. Tu décides de dire au 2eme du championnat (avant le Grand Prix d’Imola) sur une Mercedes 8 fois championne du monde que son opinion ne compte pas parce qu’il ne représente aucun intérêt…

Cette analyse aurait été pertinente si dans la foulée Leclerc n’avait pas modestement ajouté : “Je ne suis toujours pas un fan des courses sprint parce qu’au final, ça ne change rien”.

Il faut mieux s’arrêter là sur le sujet, j’ai l’impression d’acheter une FIAT Punto d’occasion à 30 000 euros avec le commercial qui me sourit en pensant à ses vacances aux Bahamas.

Ce week-end fût, en tout cas, une terrible désillusion pour la Scuderia Ferrari et ses 2 pilotes sous la pression de courir à domicile.

Carlos Sainz d’abord, partant encore à la faute sous la pluie en qualification relégué à une dixième place sur la grille avant d’être harponné au premier virage sur la course de dimanche par Ricciardo.

Puis Charles Leclerc qui aurait pu assurer une troisième place mais est allé percuter le mur en forcant sur les vibreurs à la poursuite d’une Red Bull intouchable ce week-end. Le monégasque, obligé de rentrer au stand pour réparer les dégâts, arrive à sauver les meubles avec une honnête 6e place.

Chez Mercedes, Russell a réussi à remonter le peloton de la 11e à la 4e place grâce à un bon rythme et de beaux dépassements, Hamilton lui, fait grise mine.

Tu imagines Lewis, il a dû en défoncer des pots de Haagen Dazs devant le replay…

Déjà obligé de recycler des blagues dans le même article ? Sérieusement ?

Lewis Hamilton en conférence de presse

Hamilton, condamné à une 14e place sur la grille suite à des qualifications sous la pluie désastreuse, n’a jamais sû trouver la faille pour dépasser ses adversaires.

Le septuple champion du monde finit hors des points sans circonstances atténuantes et pointe désormais à 21 points de son jeune coéquipier.

Pendant ce temps-là, Mclaren confirme sa place de 3e force du plateau ce week-end, Norris est venu conclure un bon week-end et l’écurie apparaît maintenant comme un potentiel rival à Mercedes.

Malheureusement, à contrario, Alpine ne cesse de perdre des points sur des problèmes de fiabilité qui commencent à coûter cher à l’écurie française.

Après une victoire sans contestation de Red Bull et Max Verstappen, le prochain Grand Prix à Miami, sur un nouveau circuit urbain méconnu de tous, devrait nous offrir un spectacle passionnant.

El mago

Related Posts

F1 Grand Prix de Bakou 2023 : les enseignements

F1 Grand Prix de Bakou 2023 : les enseignements

F1 saison 2023 : changements et règlements

F1 saison 2023 : changements et règlements

F1 saison 2022 : le bilan complet

F1 saison 2022 : le bilan complet

F1 Grand Prix du Bresil 2022 : les enseignements

F1 Grand Prix du Bresil 2022 : les enseignements