F1 Grand Prix de Singapour 2023 : les enseignements
Une météorite ? Un tsunami ? Un monde sans vin ? (quelle horreur !)
Non tu ne rêves pas, Max Verstappen ne s’est pas imposé ce week-end au grand prix de Singapour. Pire, aucune Red Bull ne termine sur le podium !
C’est bien Carlos et la Scuderia Ferrari qui auront donc été les premiers à mettre fin à la série de victoires interminable de Red Bull au prix d’une masterclass stratégique.
Comment la taurine en grande quantité affecte-t-elle les performances de sa voiture et ses 2 champions ?
Pourquoi Carlos Sainz a-t-il démontré avoir un Q.I de 167 et n’a jamais perdu à RISK ?
Mercedes et Russell vont-ils faire du grand prix de Singapour 2023 leur Abu Dhabi 2021 ?
Red Bull : le trou d’air
Mais qu’a-t-il bien pu se passer ce week-end pour que Verstappen, Perez et Red Bull soient aussi loin du trio de tête ?
Qualifiés 11eme et 13eme sur la grille, les Red Bull se sont fait sortir dès la Q2, un choc pour l’ensemble du paddock !
Il faut dire que les essais libres annonçaient déjà la couleur. Très en retrait, Verstappen se plaignait de conduire sur de la glace.
Ce qui, on le pensait, l’amuserait un peu, vu le peu de concurrence qu’il rencontrait jusque là…
Que neni ! Notre diva hollandaise était furieuse d’être larguée à la sortie de ces qualifications désastreuses pour Red Bull.
Sur un circuit de ville où il est si difficile de dépasser, la position de départ semblait exclure les Red Bull de toute chance de podium.
Un trou d’air casi inexplicable qui n’est pas sans rappeler celui des hégémonies Mercedes où soudainement l’écurie ultra-dominatrice semble aux abois.
Un peu comme le trou d’air de 7 ans de Lance Stroll, depuis qu’il est en formule 1…
Étrangement, lors des périodes d’ultra domination d’une écurie, celle-ci semble inexplicablement en grande difficulté sur un circuit pour des raisons qui lui échappe.
Moins étrange, il a souvent s’agit de circuits de ville (Singapour, Monaco), dont les caractéristiques atypiques ne reflètent pas celle d’une saison entière.
Néanmoins, les rumeurs n’ont pas traînées dans le paddock, on aura vite fait d’associer la perte de performance de Red Bull avec la directive de la FIA.
En effet, la FIA a remarqué que les écuries prenaient un peu trop de liberté sur la flexibilité de leurs ailerons et à resserrer la vis.
Pour résumé, en début de saison, le concept avait été validé et les mesures des ailerons fixées mais lorsque les voitures étaient à l’arrêt.
Forcément, les ingénieurs, ces petits malins, ont inventé des ailerons (avant et arrière) plus souples permettant notamment un gain dans les lignes droites.
L’explication ? Le flux d’air à haute vitesse vient plier l’aileron et permet à celui-ci notamment en ligne droite ou avec le DRS de diminuer la résistance et donc d’augmenter la vitesse.
Fruit du hasard, ce sont les Red Bull qui bénéficient depuis le début de saison d’une vitesse de pointe hallucinante grâce à leurs ailerons flexibles.
Et oui, c’est pas Gunther et ses ingénieurs qui ont pondu ça, il était occupé à tirer sur des canettes de budweiser à son week-end de rodéo texan.
Dans tous les cas, Red Bull dément le lien.
Son rythme en course semblait en tout cas bien plus solide qu’en qualification sans pour autant être transcendant.
A ce stade, seule la prochaine course au Japon pourra nous éclairer sur l’impact ou non de ce durcissement de règle sur les performances de l’écurie autrichienne.
Ferrari et Sainz : le coup de génie stratégique
Certaines courses sont avant tout des courses de vitesse pure, de dépassement, ou bien rythmées par la pluie.
On a réellement apprécié ce grand prix de Singapour 2023 dans un registre pourtant bien différent : la stratégie.
L’aspect stratégique a été la clé de ce grand prix et c’est la Scuderia qui en sort grand vainqueur avec la 1ere victoire de la saison d’une écurie non Red Bull.
En validant la pôle position avec Sainz et la 3e place avec Leclerc dans un mouchoir de poche avec Russell intercalé, la Scuderia a posé les jalons de sa victoire en qualification.
Mais elle a aussi intelligemment identifié son ennemi numéro un du week-end : Georges Russell et Mercedes.
Intelligemment, elle a déroulé un plan stratégique bien précis.
Tout d’abord, en promulguant les pneus les plus tendres à Leclerc sur la grille alors que tout le plateau partait en medium (hormis les Red Bull en pneu dur).
Oui oui, tu as bien lu, stratégie intelligente et Scuderia Ferrari dans la même phrase, pose ton inhalateur !
Une opportunité saisie par Leclerc qui, bénéficiant de l’adhérence de ses pneus les plus tendres, est venu dépasser Russell au départ protégeant ainsi son coéquipier.
Puis, ensuite, en demandant à Leclerc de laisser un écart suffisant entre lui et Sainz permettant de couvrir un éventuel arrêt anticipé de Russell (undercut).
Un écart qui sera réévalué à la hausse par la Scuderia Ferrari afin de permettre de couvrir une éventuelle arrivée de la voiture de sécurité, sur un circuit où celle-ci fait systématiquement son apparition.
L’occasion s’est présentée idéalement au 20e tour lorsque la voiture de sécurité a été déployée et que tout le monde a plongé au stand (sauf les Red Bull en pneus durs).
Grâce à l’écart laissé par Leclerc avec Sainz, celui-ci a pu aisément repartir en tête.
Leclerc perdra malheureusement 2 places pendant cette salve de ravitaillement bloqué par les voitures (Hamilton précisément) rentrant au stand.
L’essentiel était assuré puisque Sainz avait toujours l’avantage de la position sur ce circuit si difficile en termes de dépassement.
La sortie de cette semaine de Carlos Sainz senior critiquant ouvertement la Scuderia Ferrari sur un avantage certain pour Leclerc n’aura pas trouvé son timing.
Leclerc aura effectué une première partie de grand prix en bon petit soldat et se sera mué en numéro deux l’espace d’un grand prix.
En fin de Grand Prix, Mercedes à l’affût d’une opportunité viendra bien profiter de l’intervention d’une voiture de sécurité virtuelle pour changer de pneus et se lancer dans un dernier relais ultra agressif.
Une opportunité offerte par l’homme qui brisait des voitures plus vite que son ombre : “Sergant Logeant au rapport !”
Mais bien malin qui pouvait vaincre Sainz ce week-end !
L’espagnol va astucieusement laisser Norris alors 2e à moins de 1 seconde bénéficier du DRS afin de résister aux Mercedes s’offrant ainsi un protecteur de choix.
Jusqu’au bout les Mercedes ont essayé de les dépasser, en vain, les gommes plus fraîches n’auront pas suffit.
Une course parfaite pour la Scuderia, un travail d’équipe, une référence en termes d’intelligence de course, l’écurie italienne tient enfin une course référence et marque 37 points.
On ne l’avait pas vu depuis des années, et comme par hasard, cela coïncide avec la venue de Frédéric Vasseur…
Mercedes : Russell en larmes, de héro à zéro
Nombreux sont les finlandais qui avant le départ de la course auraient donné Valtteri Bottas victorieux de la coupe mulet 2023.
Pardon, je reformule…Faut pas déconner.
Nombreux sont ceux qui avant le départ de la course auraient donné Georges Russell victorieux (moi compris).
Il faut dire qu’avec une 2e place sur la grille et connaissant l’avantage des Mercedes en course face aux Ferrari, on ne donnait pas cher de Carlos Sainz.
Ajouté à cela, tout le week-end, la performance très solide du britannique devançant Hamilton et un rythme de course très impressionnant, vous obtenez la casquette de favori.
Avec des Red Bulls hors course pour la victoire et des Ferrari dont on ne connaît que bien trop les failles, Georges avait l’occasion de briller.
Mercedes n’a pourtant pas démérité pendant ce grand prix mais le départ réussi de Leclerc a compliqué la tâche de l’écurie.
Coincé derrière un Leclerc en gestion de rythme, l’opportunité gâchée du premier arrêt va se représenter lorsque la voiture de sécurité virtuelle va faire son apparition à 2 tiers de la course.
Trop risqué pour Sainz en tête et Norris inespéré 3e, seules les Mercedes vont rentrer au stand et vont se lancer dans un dernier relais en medium neufs.
Cette stratégie, elle aussi réfléchie, avait été pensée à l’avance car un train de pneu medium neuf avait été économisé chez Mercedes en vue de la course.
Après avoir effacé Leclerc, raccrochant avec Norris avec plus de 5 tours à terminer (à coup de 1,5 secondes par tour), Russell a dû se voir gagner ce grand prix.
Mais l’intelligence de course de Sainz, offrant son DRS à Norris et se servant de lui comme un bouclier, aura terminé de frustrer Russell.
Avec la pression de Lewis Hamilton, qui lui aussi, sentant la victoire, se faisait pressant dans ses rétroviseurs, Russell va s’envoyer dans le mur dans le dernier tour.
Une faute de jeunesse, la 2e de la saison, celle-là fait mal au vu de la course et vient mettre un coup au moral de celui qui s’était montré si performant ce week-end.
Le britannique était en larmes lors de son interview d’après-course, soit à cause de son accident soit parce qu’un malin lui a dit que Stroll avait prolongé son contrat de 5 ans.
Tu imagines l’angoisse ?
Hamilton a fait parler l’expérience et vient glaner un nouveau podium, il aura très fortement mis la pression sur son coéquipier sans jamais dépasser la limite, la marque des champions.
Il s’empare de la 3e place pilote au détriment d’Alonso qui aura connu une course catastrophique, tout comme son équipe, qui repart avec 0 point et voit désormais Ferrari logiquement s’envoler.
Oui, si tu vois Stroll pendant 1h à la télé c’est pas pour ses performances, c’est parce qu’il est parti détruire le mur avec son Aston Martin…
Prochain rendez-vous dès ce week-end, au Japon, sur le superbe tracé de Suzuka.
Tous les yeux seront tournés vers Red Bull afin de savoir s’ il s’agissait d’un simple passage à vide ou si celles-ci sont réellement impactées par les nouvelles contraintes aéro.